« Les étincelles invisibles » : Autisme et sorcières ☆☆☆☆☆

Salut à tous ! Comme vous le savez j’accorde une attention particulière à la représentation dans les romans jeunesse et il y a bientôt deux mois j’ai voulu un type de livres bien particulier : un roman destiné aux jeunes avec un héro ou une héroïne autiste. J’ai été choquée du nombre de résultats, la recherche n’a rien donné du tout (même en demandant sur mes réseaux sociaux). J’avais l’impression de chercher un fantôme, un livre qui n’existait pas, et pourtant j’ai fini par trouver un ouvrage avec toutes ces caractéristiques. Heureusement que Twitter est là sinon je n’aurais jamais su qu’il existait sachant que la maison d’édition qui le publiait n’en avait pas du tout parlé… Aujourd’hui j’ai l’honneur de vous présenter « Les étincelles invisibles » de Elle McNicoll chez L’école des loisirs et traduit par Dominique Kugler !

Addie, onze ans, est autiste. Lorsqu’elle apprend en cours d’histoire que son petit village de Juniper a persécuté, torturé et exécuté des dizaines de sorcières au Moyen-Age, elle est bouleversée. Ces femmes accusées de sorcelleries n’étaient-elles pas autistes ou neuroatypique comme elle ? Victime de moqueries et d’harcèlement de la part des élèves comme de l’enseignante, Addie se sent particulièrement concernée par le sort des sorcières. Elle décide de mener une campagne pour que la ville de Juniper rende hommage à ces sorcières injustement traitées.

La couverture du roman parait simple pourtant elle contient de nombreux éléments très intéressants. J’adore les couleurs qui semblent flirter doucement avec un ciel étoilé, c’est très délicat et ça montre aussi une forme de côté rêveur qui est très sécurisant. On peut voir une jeune fille de profil au centre, qu’on suppose être Addie, les yeux fermés comme pour se couper du monde extérieur. La présence du casque sur ses oreilles pour réduire les bruits pouvant être trop forts ou dérangeants m’a rappelé la série « Atypical » et le fait que le personnage de Sam ne se sépare de cet objet que très rarement. On peut remarquer des touches de jaune et d’orange présents au niveau de la tête ainsi que des oreilles de Addie ce qui me laisse supposer que c’est une forme de représentation des émotions qu’elle ressent sur l’instant et qu’elle essaye de canaliser.

J’étais tellement heureuse de tomber sur ce livre, enfin un ouvrage fictionnel avec une jeune personne autiste ! Je ne peux que vous le répéter mais la représentation dans les romans est tellement importante et lorsque j’avais fait mes recherches il y a plusieurs semaines, qu’aucun résultat n’est apparu, j’ai été extrêmement attristée. Chacun(e) mérite d’être représenté(e), de se retrouver dans un personnage de fiction et c’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles je suis ravie de vous présenter « Nos étincelles invisibles ».

Ce roman est écrit par une autrice ownvoice, c’est-à-dire une personne qui est fait partie d’une minorité ou/et d’un groupe marginalisé, qui est concerné de près par l’histoire qu’elle dépeint. L’autisme est le thème central du roman et j’estime que personne ne peut mieux en parler qu’une personne qui le vit. J’ai trouvé qu’à travers cette histoire cette jeune autrice écossaise se livrait énormément, c’est une écriture très sincère ce qui est vraiment très touchant. On est immédiatement projeté dans l’histoire, il est même difficile d’en sortir tant on veut savoir la suite des événements. A travers son récit j’ai pu apprendre énormément de choses en j’en suis ravie ! Je suis persuadée que ce roman marquera les esprits, en tout cas pour moi c’est déjà le cas !

Cette histoire m’a fait passer à travers plein d’émotions différentes. Je dirais que l’émotion qui a gouverné a été la tendresse que j’ai éprouvé tout au long du récit pour Addie et sa sœur. Elles ont créé un lien si fort et si doux, elles se soutiennent et c’est vraiment beau. L’autre émotion dominante a clairement été la colère et le dégoût ! Notre héroïne vit clairement des épreuves ignobles, j’ai eu si mal pour elle… Il a régné une telle injustice autour d’elle tout au long du livre que ça me donnait envie de rentrer dans l’histoire et d’éduquer certains personnages. Je ne pensais pas que j’étais capable d’haïr des personnages mais finalement je pense que pas mal de personnes de cette histoire gagne la palme sur tous les romans que j’ai pu lire. Toutes les situations d’injustices et de persécutions que vit Addie au fil du récit sont si horribles que ça m’a brisé le cœur…

Notre héroïne de onze ans a deux passions majoritairement présentes : les requins et les sorcières. J’ai adoré apprendre des choses sur les requins, je me suis dit que finalement ils étaient clairement plus cool que les dauphins (petit clin d’œil au roman). On sent qu’elle est très stimulée par tout ce qui a un attrait à cet animal marin, elle se renseigne dessus et est littéralement une sorte d’encyclopédie vivante sur le sujet. Lorsque les sorcières s’ajoutent à son intérêt pour les requins, le lecteur se sent lui aussi totalement stimulé puisqu’en même temps qu’elle on apprend des éléments de l’histoire de son village (et de l’histoire des procès de sorcières en général) et on en devient aussi révolté. J’avoue que je ne m’étais jamais vraiment penchée sur l’histoire des sorcières, comme les habitants de village j’en oubliais que ça s’était vraiment passé. De nos jours ça semble tellement irréaliste et pourtant c’est bien la vérité : des femmes ont été brûlées pour sorcellerie sans aucune preuve, des femmes qui auraient pu simplement mal s’exprimer, être autistes ou neuroatypiques. On finit par ressentir l’injustice et avoir envie de crier au monde qu’Addie a entièrement raison et que le fait qu’elle soit autiste ne veut pas dire qu’elle ne peut pas réfléchir par elle-même. J’avoue que je ne m’attendais pas à aimer autant que ça le thème des sorcières mais je crois bien que grâce à ce petit personnage je vais me pencher un peu plus dessus…

En ce qui concerne les personnages j’ai adoré Addie et me suis beaucoup attachée à elle, c’est une personne authentique, c’est si beau de voir un personnage comme celui-ci. Elle se bat pour ce qui est juste, pour les choses qui lui tiennent à cœur ! J’ai vraiment apprécié avoir son point de vue sur les situations qui l’entoure, c’était vraiment très intéressant et authentique ! C’est un personnage fort et j’ai énormément de respect pour elle. J’ai aussi beaucoup aimé Keddie, littéralement le pilier de sa petite sœur. On sent qu’elle a énormément souffert, elle aussi, durant son enfance et qu’en grandissant ça reste encore très dur. Je me suis moins attachée à la sœur jumelle de Keedie, Nina, il n’y a pas eu ce feeling, je me sentais trop éloignée d’elle néanmoins j’ai beaucoup aimé quand elle a commencé à s’ouvrir. Les parents ne sont pas très présents mais on sent qu’ils aiment et soutiennent leurs enfants quoi qu’il arrive, on adore cette représentation parentale ! J’ai eu beaucoup de tendresse pour Mr. Allison qui semble être énormément attaché à Addie, qui ne la juge pas mais va plutôt dans son sens d’une manière amicale et chaleureuse. Par contre j’ai détesté Mlle. Murphy, des enseignantes comme elle ne devrait pas existé, je l’ai littéralement perçu comme un monstre sans cœur. D’ailleurs tous les personnages qui s’estimaient meilleurs qu’Addie juste parce qu’ils sont neurotypique m’ont tapé sur le système, ils ne font aucun effort pour la comprendre et la soutenir. Bien évidemment j’ai aussi une haine sans faille pour sa persécutrice Emily qui, pour se sentir supérieur, harcèle et persécute Addie qui n’a rien demandé à personne. Pour finir sur une note positive j’ai adoré son amie Audrey qui prenait vraiment le temps d’aider et de comprendre Addie, c’est un personnage que je trouve très mature pour son âge.

A l’occasion de la sortie de son roman « Les étincelles invisibles », Elle McNicoll a accepté de répondre à quelques unes de mes questions ! C’est toujours un bonheur de pouvoir interviewer une autrice aussi inspirante et gentille.

Elle McNicoll

Que pensez-vous de la représentation des personnes neurodivergentes dans les romans destinés aux jeunes ?

Je pense qu’il n’y en a pas assez ! Tant de gens sont neurodivergents, et beaucoup de gens ne savent même pas qu’ils le sont. J’aimerais voir encore plus de livres.

Etant une autrice ownvoice, est-ce que ça n’a pas été trop dur d’écrire sur les persécutions et le harcèlement que subissent les personnes neurodivergentes ? 

Pas vraiment, il m’est arrivé beaucoup de choses. Je garde ma propre expérience à l’esprit lorsque j’écris sur les préjugés donc la plupart de la persécution est écrite de la vie. A part les procès en sorcellerie, évidemment, mais de nombreuses personnes handicapées en ont été victimes.

Est-ce que Addie et Keedie sont une forme de représentation de vous à l’enfance ou à l’adolescence ?

Je ne crois pas, ils sont assez fictifs. J’ai les mêmes réactions sensorielles qu’Addie, mais nos personnalités sont très différentes. J’aimerais être plus comme eux ! Keedie est l’ami que j’aurais aimé avoir.

Dans le domaine de l’éducation on se rend compte que Mlle Murphy semble trouver plus d’attrait à persécuter Addie qu’à lui fournir un soutien et une éducation. Comment vous est venue l’idée de ce personnage ? 

Encore une fois, basé sur la vraie vie. J’ai eu un adulte qui a déchiré mon travail quand j’étais enfant et je ne l’ai jamais oublié. On reçois beaucoup de lettres de lecteurs à son sujet, elle est toujours très réelle pour beaucoup de gens.

Mlle Murphy et M. Allison sont drastiquement différents, pourquoi avoir créé cet opposé ?

Pour chaque Mlle Murphy, il y a un M. Allison. J’ai rencontré tellement d’enseignants et de bibliothécaires extraordinaires et je voulais m’assurer que le livre avait un équilibre.

Ce livre parle de sorcières, est-ce un sujet que vous apprécié tout particulièrement comme Addie ? Et si non pourquoi l’avoir choisi pour votre histoire ?

Ayant grandi en Écosse, les procès pour sorcières faisaient partie de notre histoire et je les ai toujours trouvés fascinants et horribles. J’ai vu des parallèles et des facteurs reliables dans leurs histoires et j’ai pensé qu’ils feraient une bonne force motrice pour une histoire.

Si vous deviez décrire votre livre en quelques mots que diriez-vous ?

Neurodivergent et fier.

Je tiens à remercier Elle McNicoll pour le temps qu’elle m’a accordé et pour sa gentillesse ! Son livre est vraiment magnifique, je vous le conseille à 10 000 % ! C’est un récit fort, une histoire qui ne manque pas de rebondissement et qui vous fera passer par de nombreuses émotions toutes bien différentes les unes de autres. Prenez le temps de découvrir ce roman et j’ai envie d’ajouter une dernière petite chose : nous arrivons en période d’Halloween alors quoi de mieux qu’un récit qui traite de sorcières ?

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